La langue des signes se met au numérique pour favoriser l’inclusion des sourds et malentendants
Publié le 17 janvier 2022

La langue des signes se met au numérique pour favoriser l’inclusion des sourds et malentendants

Le regard porté sur le handicap a connu une certaine évolution au cours des dernières années. Cette prise de conscience progressive et collective a donné lieu à de nombreux projets dont le but est de garantir les droits de chacun. Et si le numérique était l’un des outils permettant de favoriser cette inclusion ?

En France, près de 483 000 personnes sont atteintes d’une déficience auditive profonde ou sévère. Un handicap qui peut causer des difficultés quotidiennes, notamment au niveau de la communication. En effet, ces sourds et malentendants expriment des difficultés ou une incapacité à entendre leur interlocuteur. D’autre part, les individus atteints d’une surdité depuis la petite enfance n’ont pas pu apprendre et reproduire la parole. Alors comment font ces derniers pour s’exprimer et comprendre l’autre ? Et inversement, comment les entendants peuvent-ils  communiquer avec ces personnes ?

La Langue des Signes Française (LSF) est un mode de communication qui consiste à associer un signe à un mot. De cette manière, les sourds, malentendants et entendants peuvent échanger dans un langage commun et compris de tous. Selon la Fédération Nationale des Sourds, 100 000 personnes sourdes utilisent la LSF quotidiennement. Une communauté minoritaire qui, malgré les efforts des pouvoirs publics et des associations, peine à retrouver ce langage dans la vie courante.

Certains dispositifs pourraient alors faciliter l’inclusion des sourds et malentendants, notamment à l’école, au travail et dans les espaces publics. En ce sens, les technologies numériques sont elles aussi déployées pour lutter contre l’exclusion, et favoriser l’apprentissage de la langue des signes.

 

Favoriser l’inclusion pour les sourds et malentendants grâce au numérique

L’arrivée d’influenceurs sourds et malentendants sur les réseaux sociaux

Aujourd’hui, internet met à disposition de nombreux moyens d’expression : plateforme web, réseaux sociaux, forum de discussion…  Tant d’outils qui permettent aussi de sensibiliser, partager, et former à la fois des sourds et des entendants.

Désormais, avec le déploiement massif de la fibre optique, ces supports sont accessibles de n’importe où, n’importe quand et à la fréquence que l’on le souhaite. Depuis 2013, le Plan France Très Haut Débit corrige les inégalités d’accès à internet au moyen d’infrastructures télécom partout sur le territoire. Prenant fin en 2025, le chantier bien avancé profite déjà à de nombreux français, avec 75% d’entre eux éligibles à la fibre.

Autre avantage de la fibre, sa large capacité en bande passante : les téléchargements, transferts de fichiers volumineux ou la production de supports multimédias (podcast, vidéo…) sont plus rapides qu’avec l’ADSL. Aussi, cette accessibilité a permis à de jeunes sourds de s’exprimer et de partager leur quotidien à des milliers d’internautes. C’est par exemple le cas de Mélanie (Mélanie Deaf), youtubeuse qui parle de sa surdité et réalise des vidéos en langue des signes. Elle compte plus de 66 000 abonnés sur sa chaine !

Sur Tiktok, Léa (@lea_mltz) crée des vidéos rythmées où elle livre quelques anecdotes humoristiques sur le quotidien des sourds. Elle aussi propose à ses abonnés d’apprendre le langage des signes. Grâce au format très court de Tiktok, elle présente un mot et son signe par vidéo. Sa joie de vivre a déjà su attirer près de 58 000 abonnés !

Sur internet, ces nouveaux influenceurs participent à la sensibilisation de leur handicap. Cette porte ouverte sur leur vie de tous les jours est aussi l’occasion d’aborder la langue des signes et d’en montrer les bases. Pour les internautes c’est l’opportunité de découvrir cette langue silencieuse, qui suscite un vrai engouement !

 

Elix, le dictionnaire en ligne de la Langue des Signes Française

En empruntant un geste pour chaque mot, la langue des signes semble assez complexe à mémoriser. Pour faciliter le bilinguisme, l‘association lilloise Signes de Sens a créé le dictionnaire en ligne Elix : chaque mot comprend une présentation et une définition à la fois écrite et en langage signé. Depuis 10 ans, ce support numérique fait office de passerelle entre le français et la LSF.

Avec plus de 70 000 utilisateurs réguliers, le Dico Elix connait un fort succès. Pour toujours plus faciliter l’inclusion des personnes sourdes dans la société, Signe de Sens lance l’application mobile Dico Elix et la Bulle Elix, une extension pour navigateur qui permet de traduire des mots en LSF. Pour cela, l’utilisateur clique sur un mot et une fenêtre apparaît pour montrer son signe. Tous ces outils sont gratuits afin de populariser l’apprentissage de la langue des signes.

 

Des gants connectés pour traduire la langue des signes

Et si la technologie allait encore plus loin ? Elaborés par des étudiants ukrainiens, des gants équipés de capteurs permettraient de décrypter le langage des signes. A l’aide d’un smartphone, l’utilisateur reçoit une traduction sous forme textuelle et vocale.

Distinguée lors du Imagine Cup organisé par Microsoft, « Enable Talk » souhaite faire tomber la barrière entre les sourds et entendants, sans avoir recours à l’écriture. Le système se compose d’une paire de gants bardée de 15 capteurs de flexion. Cette dernière est associée à un accéléromètre, une boussole et un gyroscope, capable de détecter précisément les mouvements. Les informations reçues par les gants sont ensuite envoyées au smartphone avant d’être comparées à une base de données prédéfinie. Dès la reconnaissance d’un signe, le smartphone traduit celui-ci sous forme de texte, puis diffuse le message de manière vocale.

Si, pour le moment, le projet n’en est qu’à l’état de prototype, les étudiants comptent bien lancer leur start-up. Avec un coût de production estimé à 20 dollars par pièce, ils souhaitent démocratiser au maximum l’outil pour faciliter l’inclusion dans la société des personnes atteintes de déficience auditive.

 

 

La culture accessible en langue des signes

La langue des signes s’appuie essentiellement sur le langage gestuel mimique, par imitation ou symbolisation. Les mouvements s’effectuent à une ou 2 mains, c’est ce qu’on appelle « signer ». Ils s’accompagnent par l’expression du visage, très importante, pour appuyer l’émotion pendant la communication. L’ensemble de ces caractéristiques font d’elle un langage à part.

Au sein de la culture, la LSF s’est souvent prêtée au théâtre, au cinéma, et parfois même à la danse. En revanche, sa présence est plus complexe dans les livres ou encore la musique. Mais le langage silencieux n’a pas dit son dernier mot !

 

Bibliodos, la plateforme de lecture disponible en langue des signes

Bibliodos est une plateforme de lecture proposant des ouvrages en différentes langues et avec plusieurs niveaux de lecture pour ceux qui souhaiteraient s’initier à l’apprentissage linguistique. On y retrouve aussi des supports conçus pour les personnes atteintes d’un handicap. Les aveugles, par exemple, ont l’opportunité d’écouter un livre en lançant une piste audio. Pour les sourds et malentendants, ces derniers peuvent consulter des livres en langage des signes : sur fond d’images en lien avec le récit, un interprète traduit les passages du livre.

En pleine évolution, le site s’adresse à tous : étudiants, amateurs de culture… Même les enfants atteints de surdité peuvent consulter la plateforme, où il est facile de découvrir un livre même en ne sachant pas lire !

 

StorySign, une application destinée aux enfants pour apprendre la langue des signes avec les livres

Pour fournir des services numériques toujours plus inclusifs, les géants de la tech s’engagent !

En 2018, Huawei crée StorySign, une plateforme d’alphabétisation en langue des signes à destination des enfants sourds. Utilisable sur n’importe quel smartphone, l’application permet de lire un livre pour enfant de manière ludique, à la fois en français et en LSF. Pour cela, StorySign s’appuie sur des technologies de pointe développées grâce à la fibre :  l’intelligence artificielle et la réalité augmentée. « Nous sommes convaincus que la technologie devrait enrichir la vie des gens et que l’IA est capable de repousser les limites du possible. » déclare l’entreprise.

Sur l’application, l’utilisateur choisit le livre qu’il souhaite lire aux enfants. Sur chaque page, il est possible de scanner les mots pour les voir interprétés de manière gestuelle. Ainsi, les enfants apprennent à reconnaître les mots écrits et, par la même occasion, à signer.
Huawei continue d’ajouter des ouvrages à sa collection, fournissant ainsi un outil évolutif.

 

De la musique en langue des signes sur Tiktok

Les sourds sont-ils capables d’apprécier la musique ? C’est une question que se posent beaucoup d’entendants ! S’ils ne peuvent, à priori, pas l’entendre, ils perçoivent tout de même les vibrations.

Pour une écoute encore plus immersive, certains entendants retranscrivent des chansons en langue des signes. De cette manière, Camille (@camilletesigne) ajuste les paroles au rythme de la chanson, pour rendre la musique plus accessible aux sourds. L’ambiance, les vibrations, la gestuelle et les expressions faciales parviennent à retranscrire les émotions de la chanson, sans se détacher de son fond.

 

 

Le handicap souligne de nombreuses questions d’inclusivité. Comment faire pour offrir les mêmes services et opportunités à tous, malgré nos différences ? Grâce à la fibre optique et aux nouvelles technologies, le numérique a prouvé qu’il pouvait œuvrer pour plus d’égalité entre les individus.

Le digital permet, par exemple, de démocratiser la langue des signes, chez les personnes atteintes de surdité comme chez les entendants. Langage à la fois silencieux et expressif, il facilite l’intégration des sourds et malentendants dans la société. Mais encore faut-il la pratiquer ! Et là aussi intervient le numérique : par les réseaux sociaux, applications, plateformes en ligne et même des gants connectés, l’apprentissage de la LSF est encouragé et démocratisé. N’importe qui peut s’y mettre !

D’autre part, le digital construit une passerelle entre la culture et les barrières du handicap ! Désormais, il est possible de lire un livre ou de percevoir de la musique grâce à des formats adaptés en langue des signes. Avec le Très Haut Débit les individus, associations et start-up laissent libre court à leur créativité, pour enrichir l’environnement des sourds malentendants.

Charlotte B.

 

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